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19/11/2003 |
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La Communaut� Sant�Egidio et son fondateur romain, Andrea Riccardi, ont l�exp�rience des fractures du monde et des brisures entre les religions. C�est ce qui donne tout leur prix � ces grandes rencontres internationales qu�organise cette communaut�, comme celle qui vient d�avoir lieu � Aix-laChapelle, en Allemagne, du 7 au 9 septembre dernier. Voil� pr�s de 400 responsables de la plupart des grandes religions du monde, des musulmans d�Irak aux bouddhistes de Cor�e, en passant par les patriarches chr�tiens du Moyen-Orient et par des dirigeants du patriarcat orthodoxe de Moscou qui, au cours de longues tables rondes, confrontent leurs convictions ! On voit alors appara�tre les foss�s qui se sont creus�s et qui se creusent partout o� la violence menace ou s�vit, de Bagdad � J�rusalem et de New York � Moscou. L�urgence du dialogue devient encore plus grande pour �viter des cassures d�finitives. C�est le cas entre les catholiques et les orthodoxes. On l�a vu et entendu � travers ce long d�bat au cours duquel, sous l��gide du cardinal Etchegaray, le cardinal Kasper, pr�sident du Conseil romain pour l�unit� des chr�tiens, et le m�tropolite Cyrille, du patriarcat de Moscou, ont expliqu� leurs positions respectives en r�pondant aux questions d�une assembl�e extr�mement attentive. Mais l�on se tromperait si l�on pensait que ce sont d�abord des querelles th�ologiques ou des litiges d�ordre institutionnel qui s�parent les catholiques et les orthodoxes de Russie. Comme l�a vigoureusement dit le m�tropolite Cyrille, c�est de la modernit� qu�il s�agit et de la fa�on d�y faire face chr�tiennement. Au nom de quoi et avec quelles armes r�sister � ce qu�il y a non seulement d�immoral, mais d�inhumain dans cette modernit� qui lui semble ne venir que de l�Occident. Et nous, Occidentaux, nous, catholiques, reconnaissons que nous avons parfois peur de refuser cette inhumanit� pratique, que le journaliste Jean-Claude Guillebaud d�non�ait il y a quelques ann�es dans son livre sur Le Principe d�humanit� (Seuil, 2001). Cette inhumanit� ob�it souvent aux lois d�un march� sans contr�le ou aux exigences des techniques les plus performantes. Alors, l��tre humain devient un pion manipulable sans conditions. Sa dignit� est ni�e. Des actes de mort peuvent �tre au terme de ces logiques inhumaines. Mais alors faudrait-il constituer une sorte de sainte alliance contre les perversions de l�Occident ? Certains doivent y penser. Peut-�tre r�vent-ils d�enr�ler des musulmans, et m�me l�islam, dans cette lutte dont les enjeux ne sont plus seulement politiques et �conomiques, mais aussi culturels et spirituels. Il est d�autant plus urgent d�engager le dialogue sur ce terrain-l�, celui de nos raisons de vivre et d�esp�rer, dans ce monde prisonnier de ses peurs et de ses �go�smes. Il est d�autant plus n�cessaire pour nous, chr�tiens, de d�blayer le chemin qui conduit � la source, � l��vangile lui-m�me, qui nous apprend que � Dieu n�a pas envoy� son Fils pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauv� par lui. � (Jean 3,17). C�est aux croyants que nous sommes de montrer que notre foi ne nous entra�ne dans aucune croisade, mais quelle nous mobilise contre toute barbarie, dans un combat incessant pour affirmer et pour d�fendre l�humanit� de tout �tre humain. Sur ces bases-l�, il est temps de d�sarmer ceux qui, parmi les chr�tiens, r�vent de la revanche de Dieu contre un Occident soi- disant coupable. C�est l�heure d�un dialogue qui oblige les religions � ne pas se calquer sur des rapports de forces politiques, mais � �tre simplement elles-m�mes : des sources de reconnaissance mutuelle et de vraie fraternit�. Cette exigence-l� est aussi un d�fi et un combat, mais d�un autre genre.
Claude Dagens
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