- September
30, 2001
Vingt
ans apr�s l'abolition de la peine de mort, Robert Badinter ne croit
pas � son retour en France
PARIS
-- Alors que la France c�l�bre le vingti�me anniversaire de
l'abolition de la peine de mort, le principal artisan de cette r�forme,
Robert Badinter, s'est montr� confiant dimanche sur l'impossibilit�
d'un retour en arri�re sur ce point, malgr� la menace terroriste.
''S'il
y a un domaine dans lequel l'ineffectivit� de la peine de mort est
�tablie, c'est bien le terrorisme'', a soulign� l'ancien Garde des
Sceaux sur France Inter. ''Jamais, nulle part, on a dissuad� les
terroristes en brandissant la menace de la mort''.
Ainsi,
''il suffit de voir que ceux qui ont provoqu� les attentats atroces,
qui sont des crimes contre l'humanit�, � New York, ceux-l� se
sont donn�s la mort en m�me temps qu'ils accomplissaient leur
acte'', a expliqu� M. Badinter.
Citant
les Brigades rouges en Italie, la bande � Baader en Allemagne, l'ETA
en Espagne, ou encore l'Arm�e r�publicaine irlandaise, Robert
Badinter a soulign� qu'aucun des pays europ�ens confront�s � une
menace terroriste dans les derni�res d�cennies n'avait song� � r�tablir
la peine de mort.
''Loin
d'un �tre un rem�de comme le terrorisme, en r�alit�, (la peine
de mort) apparait comme un facteur qui, bizarrement, nourrit ensuite
les vocations terroristes'', a-t-il m�me estim�. ''Le jugement, la
condamnation d'un terroriste, pour ceux qui partagent ses id�es,
c'est un parcours de h�ros''.
L'ancien
ministre de la Justice de Fran�ois Mitterrand est par ailleurs
revenu, vingt ans apr�s, sur les circonstances qui l'avaient
conduit � soumettre au Parlement le projet de loi abolissant la
peine de mort, adopt� par l'Assembl�e nationale le 18 septembre
1981, puis par le S�nat le 30 septembre. La loi fut ent�rin�e le
9 octobre 1981 et entra en application le lendemain.
''J'ai
toujours �t� un abolitionniste, mais je suis devenu un v�ritable
militant de l'abolition (...) apr�s le proc�s de Buffet et de
Bontemps et (leur) ex�cution � la Sant�'', a-t-il expliqu�.
Les
deux hommes avaient �t� condamn�s en 1972 pour leurs r�les
respectifs dans une prise d'otage meurtri�re. Roger Bontemps, dont
Robert Badinter avait accept� de d�fendre le dossier, avait �t�
condamn� � la peine capitale bien que la cour d'assises e�t
reconnu que seul son complice Claude Buffet avait donn� la mort.
''J'ai
accompagn� ainsi � la guillotine un homme qui n'avait jamais tu�
(...) En sortant de l�, je me suis jur� qu'aussi longtemps que je
vivrais, je combattrai la peine de mort'', a racont� M. Badinter.
Le combat qu'il engage alors ne prendra fin que neuf ans plus tard.
En
1977, l'avocat d�fend � Troyes Patrick Henry, accus� de l'enl�vement
et du meurtre du petit Philippe Bertrand. Alors que l'instruction
suivait son cours, Christian Ranucci est ex�cut�, malgr� ses d�n�gations
d'innocence, pour l'enl�vement et le meurtre d'une fillette, Val�ry
Giscard d'Estaing ayant refus� de le gr�cier.
Alors
que l'opinion publique, surchauff�e, r�clame la t�te de Patrick
Henry, Robert Badinter parvient � la surprise g�n�rale, gr�ce �
une plaidoirie enflamm�e, � obtenir des jur�s qu'il soit condamn�
� la r�clusion criminelle � perp�tuit�. Robert Badinter d�fendra
cinq autres dossiers apr�s celui de Patrick Henry et �vitera �
chaque fois la peine capitale � ses clients.
Mais
il faudra attendre l'�lection en 1981 de Fran�ois Mitterrand -qui
joue cartes sur table pendant la campagne pr�sidentielle en d�clarant
lors d'une �mission t�l�vis�e: ''je ne suis pas favorable � la
peine de mort''- pour que Robert Badinter, devenu Garde des Sceaux,
puisse proposer aux parlementaires -et obtienne- l'abolition de la
peine de mort. C'est en 1977 que la guillotine tomba pour la derni�re
fois en France.
PARIS - Robert Badinter, ancien Garde des sceaux, consid�re
que le contexte international n� des attentats antiam�ricains du
11 septembre ne doit nullement conduire � une remise en cause de l'abolition
de la peine de mort dans les d�mocraties europ�ennes.
"S'il
y a un domaine dans lequel l'ineffectivit� de la peine de mort est
�tablie, c'est bien le terrorisme", a d�clar� l'ancien
ministre interrog� sur France Inter vingt ans jour pour jour apr�s
l'adoption par le S�nat de l'abolition de la peine de mort.
"Jamais
nulle part on n'a dissuad� les terroristes en brandissant la menace
de la mort", a-t-il soulign�.
"Ceux
qui ont agi et provoqu� ces attentats atroces, qui sont des crimes
contre l'humanit�, � New York, ceux-l� se sont donn� la mort
(...), c'est dire que le terroriste donne la mort et la re�oit, il
est pr�t � l'accepter", a expliqu� Robert Badinter.
Le
principal artisan de l'abolition de la peine de mort en France
estime m�me que juger, condamner � mort et ex�cuter un terroriste
alimentent le terrorisme.
"Il
devient du fait de son ex�cution un martyr je dirai plus consacr�
encore que simplement par le crime qu'il commet et � ce moment-l�
vous avez des l�gions de jeunes gens qui � leur tour, fanatis�s
par cet exemple, cr�ent autant de commandos de la mort",
a-t-il dit.
"Loin
d'�tre un rem�de contre le terrorisme, en r�alit�, cela appara�t
comme un facteur (...) qui nourrit ensuite les vocations terroristes",
a-t-il conclu.
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