Comunità di S.Egidio


 

10/07/2003


Dossier. MOZAMBIQUE. Nouvel espoir contre le sida au Mozambique
Dimanche s'ouvrira � Paris la plus grande conf�rence scientifique de l'ann�e sur le sida, qui fera le point sur

 

les avanc�es de la recherche. Aujourd'hui et demain, un symposium de la Fondation mondiale sida travaillera sur les financements destin�s � aider les pays en d�veloppement, notamment pour l'acc�s aux trith�rapies. Au Mozambique, un des pays les plus touch�s par l'�pid�mie, la communaut� Sant'Egidio a lanc� un programme d'acc�s aux antir�troviraux pour les malades. MAPUTO, de notre envoy� sp�cial. Anita a 6 ans. Elle tient, assise sur son banc � c�t� de la Soeur Maria Elisa, sa petite valise Barbie qui contient trois flacons : un pour le matin, un pour le midi, un pour le soir. Depuis six mois, Anita prend ses antir�troviraux en sirop, en suivant partout la Soeur Maria Elisa, le m�decin espagnol de cet ancien carmel de Chokw� - � 200 kilom�tres de Maputo - transform� en h�pital pour malades du sida par les Filles de la Charit� en 1995. � Dans un an, quand tu seras grande, tu pourras prendre des comprim�s �, lui dit la Soeur. Dans le patio ombrag� du carmel, Albertino lit la Bible en anglais. N� � Chokw�, a�n� de sa famille, sa m�re l'a envoy� � 11 ans chez un oncle qui a r�ussi en Afrique du Sud. Il y a fait ses �tudes, et la f�te. � L'ann�e derni�re, je n'arrivais plus � dormir du c�t� gauche, car cela me faisait trop mal. J'ai �t� voir un m�decin qui m'a dit que j'avais la tuberculose et le sida. Je commen�ais des �tudes d'ing�nieur pour travailler dans les chemins de fer. Ma m�re m'a demand� de rentrer � Chokw� car les Soeurs pourraient soigner ma tuberculose. � Elles pourront peut-�tre maintenant aussi soigner son sida. Peut-�tre. Si Albertino rentre dans le contingent des 38 malades qui, depuis cette ann�e, re�oivent des antir�troviraux ; sur le millier de malades du sida suivis par les Soeurs ; sur la centaine de milliers de s�ropositifs de la r�gion de Chokw�, o� l'on estime � plus de 30 % le pourcentage d'adultes touch�s par le sida. Voil� un an encore, elle achetait les m�dicaments au prix fort Il y a trois ans, Soeur Maria Elisa savait qu'en Europe, d�j�, les malades pouvaient �tre soign�s. Elle affirmait alors � La Croix que � ces traitements n'arriveront jamais jusqu'� Chokw� �. Il y a un an, elle achetait au prix fort, en Afrique du Sud, des antir�troviraux pour soigner deux malades. Aujourd'hui, elle d�taille soigneusement le suivi m�dical de ses 38 malades : � Le sang pr�lev� doit arriver en moins de trois heures � Maputo au laboratoire de la communaut� Sant'Egidio. L�, ils mesurent le taux de CD4 et la charge virale du malade. Si ce taux est inf�rieur � 200, nous le mettons alors sous trith�rapie, fournie �galement par Sant'Egidio. � � deux heures de route de Chokw�, la Soeur Marie-Th�r�se, dans un autre h�pital des Filles de la Charit�, � Chalukuane, n'a pas cette chance. Elle est trop loin du laboratoire de Maputo. Elle r�ve d'un service hebdomadaire d'h�licopt�re. Prouver que traiter le sida en Afrique est possible La communaut� Sant'Egidio a d�cid� il y a un an de revenir au Mozambique pour combattre le sida. Apr�s avoir, en 1992, servi de m�diateur dans cette ancienne colonie portugaise pour mettre fin � une guerre civile de quinze ans entre le Frelimo communiste et la Renamo soutenue par l'Afrique du Sud de l'apartheid. Des �quipes de 10 volontaires, venus des communaut�s du monde entier, se relaient chaque mois au Mozambique, finan�ant leur voyage et prenant sur leurs vacances. Ce mouvement brownien induit quelques probl�mes de compr�hension linguistique, de suivi des malades et de coordination avec les administrations locales. Mais Sant'Egidio a su mobiliser les bailleurs de fonds, notamment la banque italienne Unicredito qui lui a confi� 5,5 millions d'euros pour lancer son projet Dream (r�ve), destin� � permettre � des malades mozambicains d'acc�der aux traitements contre le sida. Et � montrer au monde que traiter le sida est aussi possible en Afrique. Le centre de Matola soigne les femmes enceintes et les b�b�s Sant'Egidio a d'abord investi 500 000 Euro dans un laboratoire, d'une capacit� de 100 analyses par jour, permettant d'�valuer les CD4 et la charge virale des malades. La communaut� r�serve 50 tests par mois � M�decins sans fronti�res (MSF) qui a engag� �galement un programme d'acc�s � la trith�rapie � Maputo, 100 tests � l'h�pital central qui h�berge le laboratoire, et 30 analyses aux Soeurs de Chokw�. Le reste sert � suivre les patients des deux centres de sant� que Sant'Egidio a ouverts � Machava et � Matola, dans la banlieue de Maputo. � Machava, Hans, un volontaire, pharmacien en Allemagne, ouvre les armoires m�talliques o� sont entrepos�s les antir�troviraux achet�s chez Cipla en Inde. Hans est all� visiter le laboratoire indien qui fabrique les g�n�riques, copies conformes des m�dicaments originaux. Des g�n�riques qu'en th�orie les pays non producteurs d'antir�troviraux ne peuvent toujours pas importer, faute d'accord au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Gr�ce � ces copies, le prix annuel d'un traitement pour un malade est maintenant de 330 dollars (286 Euro). Autre avantage d�terminant : l� o� le malade occidental est toujours oblig� de prendre huit � dix g�lules par jour, venus de laboratoires diff�rents, le patient mozambicain ne prend qu'un comprim� le matin et un le soir, Cipla ayant fusionn� les mol�cules des laboratoires. Au centre de sant� de Matola, Sant'Egidio a choisi de traiter les femmes enceintes. � Nous pratiquons le test sur les futures m�res pour lesquelles nous avons une suspicion de sida ; 18 % sont effectivement s�ropositives. Si leur �tat le demande, nous leur proposons de commencer une trith�rapie � partir de la 25e semaine de grossesse. � la naissance, nous donnerons sous 72 heures de la n�virapine au nourrisson pour limiter son risque d'�tre s�ropositif �, explique Alessandra, une des volontaires de Sant'Egidio, physioth�rapeuthe � Rome. Restera alors le probl�me de l'allaitement de l'enfant. Dans un cas sur trois, le lait de la m�re transmet le virus � l'enfant. Sant'Egidio, comme MSF, encourage les m�res � utiliser du lait artificiel. � Mais � T�te, autre ville mozambicaine o� nous avons ouvert un centre, seulement 30 % des m�res l'acceptent �, reconna�t Alessandra. Marc Biot, chez MSF Luxembourg � Maputo, confirme : � En refusant d'allaiter, la m�re a peur d'�tre stigmatis�e comme malade du sida, en particulier par sa belle-m�re. � Sant'Egidio prend en charge 700 malades, 5000 d'ici � 2004 Au Mozambique, en un an, les programmes de Sant'Egidio, de MSF Luxembourg et de MSF Suisse ont permis de dispenser des antir�troviraux � plus de 1 000 malades. Sant'Egidio, qui en traite d�j� 700, pr�voit d'ici � 2004 d'en prendre 5 000 en charge. C'est peu, compar� au plus d'un million de s�ropositifs que compte le pays. C'est assez pour d�montrer aux bailleurs de fonds internationaux et au gouvernement mozambicain qu'il est possible de traiter des malades du sida. Certains bailleurs de fonds mettaient en avant � l'inutilit� �conomique d'investir dans un traitement � vie de malades, alors que l'Afrique a bien d'autres besoins �. Pourtant, des soci�t�s priv�es, comme d'importantes compagnies mini�res sud-africaines, traitent maintenant leurs employ�s. Elles ont trop perdu de salari�s dans lesquels elles avaient investi en formation. De qui s'occuper en priorit� quand les capacit�s seront satur�es ? Cet expatri� fran�ais implant� au Mozambique t�moigne : � Dans mon �quipe, en cinq ans, j'ai vu dispara�tre plusieurs collaborateurs, des employ�s venir me demander de licencier un de leurs coll�gues de travail qui leur paraissait d�velopper la maladie. � Quant au gouvernement mozambicain, apr�s s'�tre refus� dans un premier temps � choisir qui traiter, ne pouvant �conomiquement prendre en charge tous les malades, il vient de d�cider de commencer � d�livrer des antir�troviraux, � en priorit� au personnel soignant atteint par le sida �. Du coup, la presse d'opposition d�nonce une discrimination dans le traitement des malades.