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Jeune Afrique

10 August 2009

Abidjan, ville à prendre

Avec un électorat nombreux, jeune, politisé, la Perle des lagunes est un enjeu crucial. Pour remporter l’élection présidentielle prévue en novembre, il faut conquérir la capitale économique. Comment la ville sort-elle de cette période de crise ? Visite guidée.

 
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Début juillet. Abidjan est laide, grise, pluvieuse. D’épais nuages déversent des trombes d’eau rendant impraticables les artères secondaires, les immondices s’amoncellent, les routes sont devenues cahoteuses à force d’oubli… Abidjan est gâtée, comme on dit ici. Il est temps que cette situation de « ni guerre ni paix » se termine. Abidjan attend, comme le reste du pays, que les élections aient lieu, qu’on en finisse. Jadis coquette, futuriste, un peu hautaine et fière de sa suprématie régionale, la Perle des lagunes ressemble aujourd’hui à ces villes du Tiers Monde qui n’ont pas su gérer leur croissance démographique. La guerre et son lot de déplacés, venus du Nord, après l’offensive rebelle de 2002, ont fait grossir les bidonvilles. Le reste de la ville est livré à la voracité des promoteurs immobiliers et au laisser-faire des pouvoirs publics. Abidjan continue pourtant de faire rêver Ivoiriens et étrangers. Le Plateau, Cocody, Treichville, Adjamé, Abobo, Zone 4, l’île Boulay… la ville vibre.

La rénovation de l’hôtel Ivoire est en cours, l’aménagement de l’île Boulay, qui doit accueillir l’extension du port, des établissements touristiques et de l’immobilier de luxe, a démarré, d’autres projets pharaoniques sont dans les cartons : la création au nord-ouest de la ville d’un grand pôle urbain de 12 000 ha comprenant un programme d’aménagement couplé à un volet immobilier, l’autoroute Abidjan-Lagos, la Technopole du pétrole, la Cité des nouvelles technologies à Grand Bassam… Les démographes prévoient 10 millions d’habitants à Abidjan en 2050, contre 3,5 millions aujourd’hui et 65 000 en 1950, à l’ouverture du canal de Vridi. Avec la perspective d’une fin prochaine de la crise, les quartiers retrouvent peu à peu de leur vitalité. Largement épargnée par les combats contrairement à ses voisines Freetown et Monrovia, mises à feu et à sang durant les années de guerre civile, Abidjan pourrait donc très vite redevenir le symbole du « miracle » ivoirien. Il est urgent de rattraper le temps perdu.

Au Plateau, les affaires redémarrent

« Ça va un peu mieux, Dieu merci ! » explique Seydou, chauffeur de taxi. Il a fallu que l’on fixe une date pour la présidentielle, que les institutions de Bretton Woods renouent avec le pays, que les autorités payent une partie de leur dette intérieure pour que le Plateau se projette à nouveau vers l’avenir. Les hôtels Pullman et Tiama affichent presque complet. Français, Chinois, Indiens, Libanais, Américains ou Sud-Africains s’y croisent entre deux rendez-vous. Chaque jour, ces établissements louent leurs salles de conférences aux régies financières de l’État, aux groupes privés, aux institutionnels. Victor Nambéléssini Silué, PDG de la Banque nationale d’investissement (BNI), a lancé ­officiellement, le 9 juillet, sa nouvelle filiale BNI gestion, qui doit favoriser « la collecte de l’épargne longue pour l’orienter vers le financement des investissements productifs ». Un jour plus tôt, le groupe suisse Novel a présenté ses activités dans le négoce en Afrique de l’Ouest. Dans les couloirs, journalistes et commerciaux sont à l’affût d’une info ou d’un contrat pub. « Nous sommes sollicités de toutes parts. Ça nous fait plaisir que la presse étrangère revienne nous voir mais nos ressources ne sont pas illimitées », glisse un chef d’entreprise.

Le frémissement est bien là. Les banques se réinstallent, les entrepreneurs et les consultants reviennent, les investisseurs observent et se tiennent prêts. Certaines franchises comme Pano Boutique, Alain Afflelou et Yves Rocher n’ont pas attendu. Tout comme les opérateurs télécoms – MTM, Moov et Koz – qui font déjà de très bonnes affaires et rivalisent par panneaux d’affichage interposés.

L’ambiance semble apaisée. Devant l’ambassade de France, à côté du stade Félix-Houphouët-Boigny, les « Blancs » ne risquent plus les invectives et agressions des Jeunes patriotes, si fortes au lendemain de la riposte française aux attaques de Bouaké en novembre 2004. Mais, à « la Sorbonne », les agoras se tiennent toujours dans le plus grand tohu-bohu. On vient y débattre de l’enrôlement, des contentieux et du scrutin. Mais dès le soir venu, l’effervescence redescend. Le Plateau redevient, jusqu’au petit matin, une ville morte aux immeubles défraîchis.

Abobo pris par la fièvre évangélique

S’il y a un marché qui prospère en temps de crise, c’est bien celui de l’espoir. Qu’elles promettent la prospérité et la santé sur terre ou le bonheur post-mortem, les Églises et leurs pasteurs autoproclamés prolifèrent. Abobo, commune de 1,5 million d’habitants, au nord de la ville, est devenu leur fief et abrite une bonne vingtaine d’églises ou de temples. Dans le quartier du Plateau-Dokui, la Mission évangélique prophétique (MEP), la Mission internationale source de vie (MISV) et la Mission évangélique grâce de vie (Meg-vie), se disputent les fidèles. Le pasteur en vogue, c’est le « bishop » Guy-Vincent Kodja. Ancien rappeur vedette du groupe RAS, Turbo – son ancien nom d’artiste – sait chauffer les salles. On vient à son office pour chanter, danser et exulter sa foi. Simone Gbagbo, l’épouse du président, et Marie Laurence Kipré, sa fille, sont au premier rang.

Pour le journaliste Venance Konan, poil à gratter du régime, « l’exemple vient d’en haut… Au début de la guerre civile, le chef de l’État ivoirien, ancien élève d’un séminaire catholique, et son entourage passaient plusieurs jours à jeûner. Tous les Ivoiriens connaissent le pasteur Moïse Koré, le fondateur de l’Église Shékina, guide spirituel du président. Les serviteurs de Dieu qui défilent à la télévision répètent inlassablement que la crise nationale est avant tout spirituelle, et que le pays en sortira vainqueur, mais uniquement par la prière. »

Cocody, le quartier des « grands quelqu’un », surplombe une lagune fétide

Affluence record, ce 14 juillet, à la résidence de l’ambassadeur de France. Robes longues, décolletés, costumes-cravate pour la fête nationale française. Les ministres de la République – Paul Antoine Bohoun Bouabré, Sébastien Dano Djédjé, Patrick Achi, Youssouf Bakayoko –, l’ancien Premier ministre, président du Front populaire ivoirien, Pascal Affi N’Guessan, le président de la Commission électorale indépendante (CEI), Robert Beugré Mambé, les diplomates, les banquiers, les opérateurs économiques, les hommes des divers services de renseignements ont fait le déplacement malgré la pluie. Le nouvel ambassadeur, Jean-Marc Simon, dans un discours très convenu, appelle la France et la Côte d’Ivoire à tourner la page et à écrire un nouveau chapitre de leur histoire. Guy Labertit, l’ancien « Monsieur Afrique » du Parti socialiste (PS), ami du président Gbagbo, écoute d’une oreille tout en conversant avec ses amis ivoiriens.

Quartier des ambassadeurs, du palais présidentiel et des villas de luxe, Cocody connaît néanmoins son lot de misère. Au bord de la lagune, les bicoques de fortune, en bois, véritables taudis dans lesquels s’entasse la population ébriée. Un environnement qui se dégrade à l’image de cette baie, à l’entrée du quartier, où les eaux ont disparu sous les mauvaises herbes et les détritus.

Au marché de Cocody, on guette les rares touristes en quête de souvenirs. Dans les cybercafés de la Cité rouge, bastion de la Fesci, le syndicat estudiantin, les jeunes pianotent et surfent sur le Web. Sites de rencontres, de chat et Abidjan.net sont les plus prisés. À la cellule de communication du Rassemblement des républicains (RDR) aux Deux-Plateaux, une dizaine d’internautes alimentent quotidiennement les sites. La jeunesse est une cible pour les candidats. Le jour du vote, 50 % de l’électorat devrait avoir moins de 35 ans.

Port-Bouët, Treichville, Adjamé, Attécoubé : La génération nouchi a les pieds dans la boue

Devant un tas d’immondices, quelques enfants, sales et dépenaillés, tuent le temps. Ils ont entre 6 et 15 ans et attendent la visite des bénévoles de Sant’Egidio. « Ce sont les plus vulnérables de la société, ils ne font confiance à personne, s’échappent des centres d’accueil… explique Georges Adon, responsable de la communauté. Si on ne fait rien pour eux, ils sont définitivement perdus. » L’un deux, malade, vomit dans l’indifférence des commerçants alentour. La misère est là, dans le quotidien d’une grande majorité d’Abid­janais. Le taux de pauvreté est passé de 10 % dans les années 1980 à près de 50 % aujourd’hui. Le plat de riz quotidien n’est plus accompagné de viande ou de poisson mais d’un maigre filet de sauce. Sant’Egidio offre des soupes populaires aux plus démunis, les accompagne dans les centres de santé, les aide à arrêter à « sniffer la colle ». Les bénévoles de la communauté ont également monté les « écoles de la paix ». Au bidonville d’Attécoubé, près de 150 jeunes viennent suivre chaque semaine des cours de français ou de maths… « On débute aussi un programme d’inscription à l’état civil des enfants afin d’éviter que les problèmes d’aujourd’hui soient ceux de demain, ajoute Georges Adon. On estime que 4 millions d’entre eux n’ont pas d’extrait de naissance. »

Alors que la saison des pluies s’éternise, le djékouadio (« paludisme », en baoulé) fait des ravages. Le Plasmodium falciparum, le vecteur de la maladie, prolifère dans les eaux stagnantes qui servent de nid aux moustiques. Il vise particulièrement les plus vulnérables, les femmes enceintes et les enfants. Les médecins observent également une recrudescence des maladies respiratoires et asthmatiques. Pas étonnant. Les égouts dégorgent et ne sont plus curés, la pollution remonte en provoquant des suffocations humides qui se mêlent aux fumées d’échappement et aux odeurs fétides des décharges publiques.

Malgré tout, Abidjan ne perd pas son humour. D’Adjamé à Treichville en passant par Yopougon, les petits métiers, coolies, « coxers », mécanos, plaisantent volontiers dans la langue de moussa, petit nègre, et en nouchi, l’argot d’Abidjan qui se nourrit des langues vernaculaires (le dioula, le baoulé, le bété, l’attié…) avec comme épine dorsale le français. Lancé dans à la fin des années 1970 par les loubards, ce moyen d’expression de la rue a séduit la jeunesse et les artistes comme le peintre urbain Steve M’ban Deve, la rappeuse Nash et les slameurs à l’image des frères Traoré. « On exprime notre urbanité de manière artistique. Mais, nous nous battons aussi pour faire reconnaître le nouchi comme patrimoine de la culture ivoirienne et invitons les linguistes à nous aider à faire l’inventaire de cette langue qui s’enrichit chaque jour de nouveaux mots », explique Steve M’ban Deve, qui tient à jour son propre lexique. Le président Gbagbo, fin politicien, a compris le sens de ce combat : « Laissez les jeunes s’exprimer dans leur langue. C’est çà ké la vérité. »

Zone 4: les sept péchés capitaux

Depuis la crise, la Zone 4, non loin de la base militaire française, est devenue le lieu des virées nocturnes. Noceurs, insomniaques, diplomates, commerçant, belles de nuit s’y retrouvent pour boire, danser, et plus si affinités. Les plus narcissiques s’affichent dans les pages photos de Life, le nouveau magazine people qui fait un tabac. Les amateurs de reggae traînent leur nonchalance au Parker Place, scène où les artistes locaux se produisent. Pour le funk, la pop et la musique afro, il y a les boîtes de nuit, comme Le Mix Ice ou Le Cœur Samba. Dans les carrés VIP, le champagne coule à flots. Pour les amateurs, il y a aussi les nombreux clubs de strip-tease. Les riches libanais préfèrent les établissements plus cosys comme le Bar Blanc ou le Butterfly. Pour casser la croûte ou boire un verre, d’autres se retrouvent au snack d’Al Bakawat. Un Libanais apostrophe le serveur : « Hadj, moi j’ai besoin de mon whisky. » Deux tables plus loin, les femmes, revêtant le hijab pour certaines, fument le narguilé.

La communauté, qui possède entre 40 % et 60 % de l’économie nationale, est souvent prise pour cible depuis qu’elle a racheté des affaires aux Français au lendemain des événements de novembre 2004. Le 15 juillet, un des leurs a blessé par balle un de ses employés, un Guinéen, entraînant des manifestations de représailles. Un acte isolé qui jette néanmoins le discrédit sur la communauté. Pourtant, les représentants religieux et des personnalités comme Roland Dagher, membre du conseil économique et social, appellent régulièrement leurs « frères » à avoir un comportement exemplaire.

Au retour, sur le pont Charles-de-Gaulle, les barrages n’ont pas disparu mais les corps habillés se veulent plus courtois qu’aux sombres heures de la crise. Le ministre de l’Intérieur et proche du chef de l’État, Désiré Tagro, veut réhabiliter l’image du policier à quelques mois de la présidentielle. Un de ses commissaires a même pris langue avec le responsable du journal satirique à grand succès Gbich, Zohoré Lassane dit Z, pour faire modifier le comportement des corps habillés dans ses BD.

Île Boulay, rendez-vous de la jet-set

Au restaurant Asna, non loin du boulevard de Marseille, le tout-Abidjan se retrouve le dimanche pour déjeuner de spécialités de poisson et se raconter les derniers cancans de la ville. C’est aussi le fief des amateurs de pêche et de plongée sous-marine. Dans une ambiance bon enfant, les Français font sonner les boules de pétanque et couler le pastis. Jean-Édouard, réparateur de bateau, parti au Sénégal au lendemain des émeutes de novembre 2004, est revenu. « L’état d’esprit ne m’a pas plu. Abidjan est unique. » Cette marina sert aussi d’ancrage pour les hors-bord à destination de la « baie des milliardaires » sur l’île Boulay. Riches Européens, Libanais, « refondateurs » du régime s’y retrouvent le temps d’un week-end. On s’y ressource, on y pratique les sports nautiques dans un univers totalement vierge, on y donne des mariages et des fêtes somptueuses. Avant de se replonger le lundi suivant dans le stress et le tumulte de la métropole.


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