Président de la Fédération protestante de France, le pasteur Claude Baty sera présent à la Rencontre des religions pour la paix du Trocadéro, le jeudi 27 octobre prochain. Pour lui, le dialogue interreligieux est rendu plus nécessaire que jamais par l’importante arrivée en France de religions non chrétiennes. Deuxième entretien d’une série de six en préambule de la prochaine rencontre interreligieuse d’Assise. Sentez-vous un désir de dialogue de la part des protestants de France ? Il est toujours délicat de parler au nom de tous. La Fédération protestante considère ce dialogue comme important : elle est d’ailleurs à l’initiative de la création de la CRCF. Pour nous, dans la société actuelle, il ne s’agit pas d’une question secondaire : tant qu’il n’y avait quasiment que des chrétiens en France, le besoin du dialogue était moins aigu. Aujourd’hui, notamment avec la présence importante de musulmans dans l’Hexagone, la question interreligieuse rencontre nos concitoyens tous les jours. Comme le dit le proverbe, « nécessité fait loi ». Avec trois représentants chrétiens sur six, le but de la CRCF n’est-il pas finalement de créer un lieu de dialogue avec l’islam ? Il ne s’agit absolument pas d’une confrontation des chrétiens et des musulmans. Ensemble, nous cherchons plutôt par quels moyens les religions peuvent s’exprimer dans la société française aujourd’hui, face à la progression d’une sorte d’intégrisme laïc. Cette préoccupation est portée par tous. Certains observateurs parlent d’un essoufflement du dialogue interreligieux. Est-ce votre cas ? Absolument pas. En revanche, je crois que ce dialogue est en train de prendre une autre forme. Pendant un temps, ce dialogue a porté sur des questions théologiques, faisant intervenir des spécialistes. Aujourd’hui, le dialogue se concrétise dans la rencontre des personnes, sur le terrain. Il s’avère ainsi plus en prise avec le réel. Nous sommes arrivés au bout d’un chemin avec les échanges théologiques ; tout le monde s’est aperçu qu’il serait compliqué d’aller plus loin. Chrétiens et musulmans n’auront jamais la même théologie et les bouddhistes sont athéistes. Le but du dialogue interreligieux n’est pas de bâtir une religion molle dans laquelle chacun pourrait trouver sa place. La Fraternité Saint-Pie-X juge scandaleuse la rencontre d’Assise. Êtes-vous inquiet ? Nous ne devons pas cesser d’encourager l’esprit d’Assise. Dans nos sociétés comme dans les religions, l’intégrisme progresse. À Munich, lors du rassemblement pour la paix organisé par la communauté Sant’Egidio, nous avons ainsi été pris à parti par des intégristes catholiques nous traitant de renégats, notamment à cause de nos échanges avec les représentants musulmans. Nous devons promouvoir une confiance en l’avenir et nous avons à combattre des peurs. Nous ne devons pas laisser s’installer de part et d’autre des gens prêts à reprendre l’épée. Comprenez-vous la crainte que peut inspirer la montée de l’islam en France pour certains ? Sans vouloir trouver un coupable, je note que les médias montrent toujours ce qui fait scandale dans les religions. Concernant l’islam, le projecteur est systématiquement placé sur les dérives extrémistes, alors que la majorité des musulmans en France n’aspirent qu’à vivre en paix. À ceux qui nous accusent de faire preuve de naïveté, je réponds que je ne nie pas l’existence de courants extrémistes au sein de l’islam. Les musulmans sont d’ailleurs les premiers à les dénoncer. Mais arrêtons d’avoir peur des autres et faisons confiance à Dieu. Source : www.famillechretienne.fr le 21 octobre 2011