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Rome : dans la basilique Saint-Barthélemy, la mémoire d'un évêque cambodgien victime du génocide des khmers rouges Il s'agit d'un fragment du lit de bois sur lequel, pendant sa déportation, l'évêque célébrait clandestinement la liturgie. Sous le régime des khmers rouges, dont on estime qu'il a provoqué plus d'un million sept cent mille victimes, tout culte religieux était interdit et puni de mort. A la fin de la prière, le fragment a été placé sur l'autel où sont conservées les mémoires des martyrs et témoins de la foi d'Asie et d'Océanie. _________________________________________________________ Le 18 avril au matin, l’ordre d’évacuation touche également Monseigneur Salas et les deux prêtres cambodgiens qui s’étaient séparés par précaution de leurs confrères français. En partant, l’évêque recommande : « Ne nous oubliez pas ! Parlez de nous au monde ». Il se mêle ensuite à l’énorme flux silencieux de gens qui se dirigent vers le nord de la capitale. Des témoins racontent que, sur une étape du chemin, l’évêque les avait bénis en disant : « Frères, nous n’aurons certainement plus l’occasion de nous réunir pour la prière. Même si vous devez éprouver la faim, la misère et la souffrance, conservez la foi et communiquez-la ». L’évêque, les pères, des religieuses avec des enfants orphelins qui leur avaient été confiés réussirent à rester ensemble et arrivèrent dans le village de Taing Kauk, dans la province de Kompong Thom, déclarée « coopérative collective ». Monseigneur Salas fut envoyé à Phum Chan, un village situé à quelques kilomètres de là, où la nourriture faisait particulièrement défaut à cause de la famine provoquée par le régime. Chacun devait chercher à manger et se nourrissait de racines ou de ce qu’il pouvait trouver. Monseigneur Salas tomba malade, atteint de béribéri, et un œdème pulmonaire se forma. Lorsque l’Angkar enrôla des personnes dans les « troupes mobiles de secteur », Monseigneur Salas se porta volontaire pour rencontrer d’autres religieux et religieuses dispersés dans le pays. En septembre1977, sa sœur fut informée de son décès à l’âge 39 ans, dans la pagode de Teuk Thla, transformée en hôpital. Des témoins ont raconté qu’il était mort d’épuisement et de faim. Souffrant d’un œdème, en effet, et ne pouvant travailler, il ne recevait pas la ration de riz destinée aux travailleurs, mais seulement de l’eau. Affaibli et malade, il mourut avec dans sa main une petite Bible confisquée par la suite et fut enterré « par les soins de l’Angkar ». Tous les responsables de l’Église catholique et onze pasteurs protestants furent tués ou moururent des suites de privations sous Pol Pot. Toutes les églises, les couvents et cimetières ont été systématiquement rasés. A partir de 1979, quand le pays fut libéré des khmers rouges, le souvenir de la foi de Monseigneur Salas et des autres martyrs cambodgiens a accompagné la renaissance de l’Église.
L’évêque Joseph Chhmar Salas naît en 1937 à Phnom Penh, au Cambodge. Il fait ses études de théologie à Paris. Il est ordonné prêtre en 1964 et sert l’Église en formant les catéchistes dans le diocèse de Battambang.
A la veille de l’entrée des khmers rouges à Phnom Penh, en1975, les étrangers et les missionnaires furent invités à se mettre en lieu sûr à l’étranger et beaucoup, dans cette situation dangereuse, durent partir. L’Église cambodgienne risquait de rester sans pasteurs car les étrangers allaient être expulsés ou emprisonnés et il devenait dès lors nécessaire d’ordonner un évêque cambodgien. Le Père Salas, qui se trouvait alors en France pour une année sabbatique, reçut une lettre de l’évêque Yves Ramousse qui l’invitait à revenir. En quittant le séminaire des Missions Étrangères de Paris, il ne se faisait guère d’illusions : « Je vais au Cambodge pour y mourir », disait-il à ses confrères. Mais il obéit à son évêque et revint immédiatement dans son pays. L’ordination épiscopale fut anticipée et célébrée en hâte car la prise de Phnom Penh par les khmers rouges était imminente et le couvre-feu déjà instauré dans la ville. Consacré évêque le 14 avril 1975, il est nommé évêque coadjuteur du vicariat apostolique de Phnom Penh. Trois jours plus tard, le17 avril, les khmers rouges entraient à Phnom Penh et évacuaient toute la population, y compris les malades, les personnes âgées et les enfants. Le génocide commençait qui provoquerait un million sept cent mille morts, parmi lesquels le nouvel évêque. Sous le contrôle de l’Angkar (l’Organisation), s’enchaîneront pendant plus de quatre ans les déportations de l’ensemble des habitants – le nouveau peuple – dans les campagnes. Les conditions de vie relèvent quasiment de l’esclavage ; les familles sont séparées et l’on vit dans les coopératives, les enfants sont retirés à leurs parents. Tous ceux qui ont étudié, qui portent des lunettes ou qui connaissent une langue étrangère, sont des suspects à rééduquer ou à supprimer. Les écoles sont fermées et l’on tente de réduire le vocabulaire à deux mille mots de base. Non habitués aux très dures conditions de vie dans les campagnes, les gens meurent par milliers des suites de privations, du fait notamment des réformes agricoles que les khmer rouges réalisent sur la base de vieilles traditions, excluant les techniques modernes. Fermé aux observateurs et livré aux mains d’un groupuscule détenant le pouvoir composé de familiers et de fidèles de Saloth Sar (Pol Pot), le pays se transforme en un immense camp de concentration. |
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